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En février 2020, la loi anti-gaspillage et pour une économie circulaire (Agec) est ratifiée. Avec ses 130 articles, ce texte ambitieux doit transformer la gestion des déchets en France.
Cinq ans après, qu’en est-il ? Quelles changements positifs ont été induits et à quels freins doit-on faire face ?

La loi Agec en détail : les 5 axes de travail
Cette loi vise à opérer une transition entre notre société dite « de consommation » basée sur le tout-jetable et celui de la réutilisation. Concrètement, plutôt que de produire toujours plus de neuf, favoriser le réemploi et initier de nouvelles filières économiques. Son application est échelonnée en plusieurs étapes et sur plusieurs années jusqu’à 2040. Découvrons les 5 axes de travail de la loi Agec.
- Sortir du plastique à usage unique :
C’est à dire, réduire significativement voire éliminer tous les emballages plastiques jetables. Le plastique à usage unique désigne tout produit en plastique conçu pour être utilisé une seule fois avant d’être jeté, sans possibilité de réutilisation.
Ainsi, pour la première période 2021 à 2025, la loi AGEC mise sur :
- 20% de réduction des emballages plastiques à usage unique d’ici fin 2025 avec au minimum la moitié obtenue grâce au réemploi ;
- Recycler 100% des emballages en plastique à usage unique.
Diverses mesures ont vu le jour depuis 2021 : l’interdiction des gobelets, verres et assiettes jetables en plastique. Suivi de l’interdiction des pailles, couverts, confettis et boîte en polystyrène expansé. En 2022, on supprime les suremballages de certains fruits et légumes de – 1.5 kg, ceux des sachets de thé ou encore des jouets gratuits dans les fast-food. En 2023, la vaisselle jetable en restauration rapide servant plus de 20 couverts simultanément sur place doit être remplacée par de la réutilisable.
2. Mieux informer les consommateurs
Cela passe par l’éducation et la sensibilisation pour apprendre aux consommateurs à mieux trier, consommer responsable tout en veillant à ce qu’ils soient mieux informés par les marques sur les risques qu’induit l’utilisation du plastique pour la santé.
Un logo unique doit harmoniser et simplifier la question du tri sur l’emballage, tout comme les couleurs des poubelles sur l’ensemble du territoire. Depuis le 1er janvier 2024, le tri des biodéchets a été généralisé, touchant à la fois les professionnels et les particuliers.
3. Lutter contre le gaspillage
L’une des mesures principales a été d’interdire l’élimination des invendus non alimentaires qui doivent être donnés à des associations caritatives luttant contre la précarité ou d’autres structures faisant partie de l’économie sociale et solidaire. D’ailleurs, le secteur de l’alimentaire doit réduire de 50% son gaspillage en 2025 par rapport au niveau de 2025.
Pour réduire la quantité de papier produite lors de chaque passage en caisse, il est depuis avril 2024 obligatoire de proposer aux clients un ticket papier ou un reçu par mail, dématérialisé. Le ticket de carte bleue n’est plus systématiquement imprimé.
4. Contrer l’obsolescence programmée et favoriser le réemploi
Il n’est désormais plus question d’obsolescence programmée mais bien de durabilité, notamment en améliorant la réparabilité et en facilitant le financement de ces réparations pour le consommateur.
Le décret du 1er janvier 2021 a mis en place un indice de réparabilité à afficher sur les équipements électroniques et électriques. Il concerne également la vente en ligne qui doit aussi indiquer cet indice sur leurs fiches produits.
5. Responsabiliser l’ensemble des acteurs économique
La loi Agec renforce les responsabilités des producteurs en renforçant le principe du « pollueur-payeur » selon lequel ceux qui fabriquent, distribuent ou importent un produit doivent financer et organiser sa gestion en fin de vie (collecte, réutilisation, recyclage, etc.).
Pour mettre en œuvre ce principe, la loi s’appuie sur les filières à responsabilité élargie du producteur (REP). Ces dernières obligent les producteurs à assumer la gestion de leurs déchets en mettant en place un système individuel de collecte et de traitement soit via des éco-organismes financés par une écocontribution.
Au sein de certaines filières, des fonds dédiés à la réparation et au réemploi sont créés et les entreprises concernées contribuent à ces fonds à hauteur de 5% de leur contribution à la filière. Ces fonds permettent de soutenir les acteurs de l’Economie sociale et solidaire qui œuvrent dans les domaines du reconditionnement et de la réparation de biens électroniques (téléphones, ordinateurs) ou d’électroménagers (lave-linge, petits appareils…).

Pourquoi la diminution de l'usage plastique doit rester une priorité ?
Le plastique, largement composé de pétrole transformé et d’additifs chimique, est très polluants pour l’environnement. En moyenne, un déchet sauvage met 450 ans à se dégrader. Lorsqu’il se fragmente en morceaux de plus en plus petits et volatiles, le plastique intègre le cycle de l’eau et se retrouve partout autour de nous. Nous mangeons et nous respirons du plastique.
Les conséquences sont multiples et pour n’en citer que deux :
- le plastique est néfaste pour notre santé : en particulier certains de ses composants chimiques comme les phtalates et le bisphénol A. Ces éléments peuvent agir comme perturbateurs endocriniens en interférant avec le système hormonal humain. Cela peut entraîner des troubles de la reproduction ou des risques accrus de maladies chroniques, de cancers, des problèmes de fertilité… Plus alarmant encore, une étude scientifique publiée dans la revue Nature Food indique la migration du polypropylène utilisés pour les biberons dans le lait contenu à l’intérieur.
- les déchets plastiques abandonnés tuent chaque année 1,5 millions d’animaux marins : d’ailleurs, 80% des déchets plastiques retrouvés en mer proviennent des terres.

2020 à 2025 : entre avancées et retours en arrière...
Au 1ᵉʳ janvier 2025, l’article 28 de la loi EGAlim doit appliquer la suppression de l’ensemble des contenants en plastique utilisés pour la cuisson, le réchauffage et le service dans les domaines de la restauration scolaire, universitaire et dans les établissements accueillant des enfants de moins de six ans. Seules les collectivités territoriales de moins de 2 000 habitants bénéficient d’un délai, jusqu’au 1ᵉʳ janvier 2028. Les services hospitaliers de pédiatrie, obstétrique et les maternités sont également concernés. Cependant, plusieurs dérogations ont été fixées par décret pour l’utilisation d’éléments en plastique pour des raisons de santé.
Ces dérogations freinent les mises en application de la loi AGEC. Comme précisé plus haut, depuis le 1ᵉʳ janvier 2022, le conditionnement de fruits et légumes frais pour des quantités inférieures à 1,5 kg dans des emballages plastiques n’est normalement plus possible. Pourtant, de nombreux fruits et légumes sont exempts de cette loi. La raison : ces aliments seraient trop détériorés par de la vente en vrac. On a du mal à imaginer que cela soit vraiment le cas des pommes de terres par exemple, qui sont toujours emballées dans du plastique. Les lobbies de l’industrie de l’agro-alimentaire et de l’emballages ont saisi par deux fois le Conseil d’État pour faire annuler les décrets. Après un premier texte annulé fin 2022, le Conseil d’État a annulé la deuxième version en novembre 2024.
L’espoir réside dans l’application d’une loi globale à l’échelle européenne, ce qui devrait être le cas d’ici 2030 concernant les emballages et déchets d’emballages.